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Photo du rédacteurHenri Baron

AUTOBIOPOÈMES - Exils

Dernière mise à jour : 1 janv. 2023


Textes écrits de 1987 à aujourd'hui




CHARME OU MALÉFICE

Je m'alluvionne

sur la courbe de tes rivages je t’illusionne de mes incessants ravages sur ton buisson ardent je nous désillusionne sur le doux de tes reins j'irai mécréant prier tes seins sur l'autre hémisphère aux suaves saveurs bienveillantes mais si l'éternité reste à défaire je sombrerai dans ta prunelle à la sombre invite accueillante comme en un cœur de pucelle

Paris, 10 janvier

© Autobiopoèmes, Exils


 


EXIL AMOUREUX


Mon amour murmurait entre cuisse et nombril bel et pur belle épure mon amour je ne te croyais ni d'elle ni d'il ni tes blanches ailes ni ta pâle idylle ni tes hirondelles ni tes archipels ni tes rêves d'iles jamais pour toujours condamné à l'exil con damné à l'ex-il

Paris, 11 janvier

© Autobiopoèmes, Exils


 

NUIT LYONNAISE


à Hélène R.


Rêve ou souvenir ?

Mille fois j’ai vécu cette nuit de l’hiver lyonnais, mille fois j’ai descendu les escaliers sombres vers les fleuves noirs, mille fois j’ai croisé ces regards honteux et ces visages blafards, mille fois j’ai couru le long des quais déserts et malodorants, implorant ton amour...

Réalité, ou pure illusion de mon âme rêveuse ?

Le soir sombre par taches

Et semble recouvrir

La ville vile et lâche

Qui paraît s’évanouir

Dans la brume nocturne

Sensuelle et taciturne

Les passants se font rares

Les passes sont désertes

Les filles du trottoir

Filent d’un pas alerte

Au bras de leurs amants

D’un soir pour quelques francs

Les guitares se taisent

Au fond du cabaret

Et les dernières braises

S’éteignent sous les pieds

Des danseuses aux seins nus

Aux lèvres des canuts

Les traboules se vident

Des dernières putains

Au teint bien trop livide

Pour faire jouir matin

Les obscènes crapules

Qui les payent sans scrupules

Sur les quais métropoles

gisent de vieux dockers

Saouls de mauvais alcools

L’âme ivre de poker

Alors s’endort le Rhône

Aux confins de la Saône

Alors s’endort mon corps

Ivre de ton corps blond

En ton brûlant lit d’or

Où je me glisse oblong

Et je m’immole aux braises

De mes amours lyonnaises


Rochefort-sur-Mer, 10 février

© Autobiopoèmes, Exils


 

LE DISEUR DE MÉLANCOLIES


"Dans la ville endormie le diseur de mélancolies..."

Magali MO

À la croisée des sentes feintes entre terre et ciel entre un verre d'absinthe et la cuiller de miel entre les vers de l'absente et l'envers des rêves jusqu’à la cruelle attente d'une montée de sève quand avant le jour déjà triment les pauvres et que dorment sur leurs crimes les faubourgeois une plainte perforante enmauve la brume en rabat-joie Le diseur de mélancolies psalmodie dans le désert la ville verticale endormie et ses rimes à limonaire Il n'est mélodie qu'allumés les réverbères à la mort de la nuit aux heures délétères L'aurore en bancales lignes de fuite enchaine lunes et chimères l'amour en diagonale en suite

addict d'alcools amers


À l’étal encore gris

sortie d’un Chaplin

un chouia rossinante

une fleuriste morose

emmêle ancolie

et pétales de rose

à la plainte lancinante

d’un amour chasse-spleen

et d’un orgue de barbarie

Dans la ville endormie

sous un ciel fourbe

l’éteigneur de réverbère

redresse les courbes

et le diseur de mélancolies

entre clous et planches

emporté par deux cerbères

en blouse blanche

lentement sombre en l’oubli



Paris, 21 juin - 4 juillet

© Autobiopoèmes, Exils



Photographie de Magali MO




TOXIQUE

Cœur de pierre pour sarabande mortuaire en transes tu pseudodanses sans âme sans fin seul le courage doute je t'aimais mais tu l'as feint tu saltimbanques en route tu saltimbanqueroutes sans préliminaires

* * * * * * * * * * * * *

Lui se prend pour Eros se pose en héros s'impose et s'offre ton sang de rose son érotisme en défaut son faux sabre en son fourreau à l'instant des palabres tu te cabres

* * * * * * * * * * * * *

Tu l'ignores et sa tare infidèle barbare mais un peu tard seul son ego scabreux vante son honneur et s'agite sans pudeur dans l'ivresse des vents des fausses censures et les fosses du Tartare jusqu'à la garde aux confins de camarde c'est l'instant des blessures

* * * * * * * * * * * * *

C'est l'instant des souffrances des sales vérités tues des longues errances sur les sentes battues les vagues impasses de Charybde en Sylla de cauchemars glauques en pulsions sordides et ces psaumes impies et rauques pour cœur mystique et soumis

Paris, 1er octobre

© Autobiopoèmes, Exils


 

EXIL EN INSOMNIE


Par la persienne la lune fait des siennes péripatéticienne chiromancienne elle me colonise me tyrannise m'agonise m'insomnise La nuit s'éternise je deviens loup à Venise flou en exil fou condamné à l'asile

Paris, 4 octobre

© Autobiopoèmes, Exils


 



(AN)ABSTÈME


Que sais-tu de ma sève

De mes morts maléfices

Tu t’enivres sans trêve

De mes mains oasis

– De mes vains artifices


*****


Tu me rêves sage érotique

Quand tu m’enlaces m’enlaisses

Je ne suis qu’un hère erratique

Anathème aux cent sirventès

– Anabstème au sang d’allégresse


*****


Profanées tes lèvres sur mes silences

Jusqu’au fiévreux frisson sur mon échine

Tuée mon opalescente insolence

À la lie du calice à colchicine

– Tu es ma douce amertume assassine


Paris, 18 octobre

© Autobiopoèmes, Exils



 


EXIL ÉTHYLIQUE


à Aline C.


Ses yeux noirs se cernent

De profondes rides

Et cherchent un corps

- Celui d’un amant ?

Un amour fragile

Désespérément.

Ses lèvres se ferment

Sur un verre vide

Et boivent encore

- Ou bien font semblant ?

À l’amour facile

Égoïstement.

Son âme s’énerve

Dans l’aube livide

Rêve à l’âge d’or

- Ô trêves d’antan !

D’un amour fébrile

Éphémèrement.


Pont-sur-Yonne, 5-6 novembre © Autobiopoèmes, Exils



 


EN NUIT


J’écris

nu comme un ver

J’écris

ni trop mûr ni trop vert

J’écris

les jadis les naguère

J'écris demain comme hier Je crie en humble troubadour


J'écris des nuits entières J’écris

au lance-flamme ou pierre

J’écris

en temps de paix et de guerre

J’écris

riche de toi dans la misère


Je crie jusqu'à en écorcher le jour


J’écris

à la gouaille de la tenancière

J’écris

au sourire forcé de la postière

J’écris

aux affres de l’infirmière

J’écris

aux larmes sèches de la caissière


Je crie

en compte à rebours


J’écris

sans confins sans frontières J’écris

à coups dans la fourmilière

J’écris

pour charmer les geôlières

J’écris

à celleux qu’on laisse à la mer


Je crie

sans rime à zemmour


J’écris

poursuivi d’usurières

J’écris

sur les murs des pissotières

J’écris

de mes veines libertaires

J’écris

du fond de ta croupière


Je crie

à rougir les bourges de Cabourg


J’écris

m… aux rancunières

J’écris

maudites fées putassières

J’écris

j’éructe j’ulcère

J’écris

des gouffres d’enfer


Je crie à en gangrener l'amour


J’écris

en chat de gouttière

J’écris

comme on griffe on lacère

J’écris

au creux des roncières

J’écris

chemin des ornières


Je crie

sans clairon ni tambour


J'écris de païennes prières

J’écris

sans morale et sans père

J’écris

un anti-bréviaire

J’écris

à l’encre-colère


Je crie

sans cœur sans humour


J’écris

au chaud dans ta chatière

J’écris

sans prélude sans manières

J’écris

sur la soie de ta guêpière

J’écris

nos amours sorcières


Je crie

de ta petite cour


J'écris de sombre et de lumière

J’écris

à crever ce cancer

J'écris

en suivant ma bière

J’écris

une bouteille à l’amer

Je crie pour t'aimer toujours

Paris, 8-10 décembre

© Autobiopoèmes, Exils



 


HOSPITALITÉ


Est-ce que je peux t'emprunter un peu de temps un peu d'été ou de printemps un peu de terre lopin à vivre loin de mes guerres un peu de rire tourner la page un peu de tendre et de partage bûches à fendre demain la paix un peu de pain le verbe aimer cœur sur la main cœur sur la grève un bout d'enfance un peu de rêve un peu d'en France

Est-ce que je peux t'emprunter un peu d'amour je te rendrai

un peu chaque jour

de mon ultime exil

tant que durera ma vie

pour m'avoir offert asile

à toi hôte ou hôtesse merci

Longues-sur-Mer, 25 décembre

© Autobiopoèmes, Exils


 



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