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  • Photo du rédacteurHenri Baron

AUTOBIOPOÈMES - REVER(S) (2e partie)

Dernière mise à jour : 1 janv. 2023







63




Je t'attends à la fenêtre les minutes s’égrènent

semblent des siècles

mon corps épouvantail lance des SOS

quand le tressaillement du chat

annoncera-t-il ton retour dis quand reviendras-tu frapper comme à coutume de ton index plié sur le ventail vitreux

trois brefs trois longs trois brefs trois brefs trois longs trois brefs

trois brefs trois longs trois brefs auras-tu sur tes pas le loup blanc le dévoreur de rêve à tes trousses le prince charmant misogyne harceleur

ou le monstre errant échappé du donjon

poursuivant après toi

tes chimères et vieux démons

Je t'attends à la fenêtre et tu n'arrives pas dehors les foules déroulent

les êtres semblent s’attirer se séparer l'averse ricoche sur le rebord tinte au carreau je n'y arrive pas trop d'impatience trop d'importance assis sur la poubelle le chat garde mon cœur absinthant l'attente sur un quai sans âme et sans correspondance il suit mon regard

hagard se demande pour quelle fallace

pour quel hasardeux espoir

Je t'attends à la fenêtre as-tu faim de fruits rouges et noirs as-tu soif de venins amers as-tu froid

vois comme je frissonne la pluie cesse et la nuit tombe avec traitrise entre chienne et louve la rue s'emmitoufle dans son manteau de brume que douchent les réverbères ce soir comme hier cloche sans fin Saint-Esprit sombre et déraisonne

Je t'attends à la fenêtre

rêves-tu de m'embrasser

m'enlacer

me lacer me lacérer rêves-tu d'avalanches d'avaler ma langue de vins et de vertiges

rêves-tu de cascades de torrents de tremblements

Je t’attends à la fenêtre

depuis si longtemps

combien là-bas de métros se sont-ils arrêtés

combien de bus sont-ils repartis

combien de je t’aime ont-ils expiré

lors de leur vol aléatoire

comme un souffle de pissenlit

Je t'attends à la fenêtre quelle heure peut-il bien être celle du leurre et de la folie du fourbe et du laid celle du sang d'encre


Je t’attends à la fenêtre

le temps est-il de paraitre

ou de déposer une offrande

est-il à tuer de mort lente et je t'attends à la fenêtre



Paris, 10-15 novembre © Autobiopoèmes, REVER(S)



(chaque strophe comprend un nombre premier de vers : 19, 17, 13, 11, 7, 5, 3, 2)


 

64



Nœud de vipère

nœud de galère

la vie la mort

quoi C'est beau un nœud coulant un nœud neuf surtout un qui n'a jamais servi car ça sert un nœud coulant c'est même très utile ça serre sans effort même quand tout est raide même quand tout est dur c'est comme un chamallow quand on rêve loukoum ça coule comme la Seine au printemps ça glisse matelot sous les vents toutes voiles dehors ça va ça vient comme un vers de Verlaine sur des lèvres vérolées un révolver de Rimbaud dans la bouche alouvie C'est cool un nœud coulant ça laisse du beau sur la peau de l'automne après l'été un ciel juste après le brasier après que le soleil a coulé des teintes fraiches après les chaudes éteintes les étoiles c'est âpre un nœud coulant comme un jus de prunelles en novembre comme un pisse-dru nouveau en fond de gorge élimée comme un souvenir de môme en cœur fossile C'est drôle un nœud coulant avant la chute du tabouret



Paris, 18 novembre © Autobiopoèmes, REVER(S)


 

65




Pourquoi fallait-il se laisser

tordre les cœurs

tuméfier les corps

avant même que n’éclose la pivoine

avant qu’elle ne se fane


Je me souviens de ces rares moments enfance

lorsqu’étincelaient les cétoines



Paris, 22 novembre

© Autobiopoèmes, REVER(S)


 

66



Tu me désempares

me dépassionne

me désespères me désavoues me déprécies

me décrédites me déshonores me dénatures

me détermines

me désaccordes

me désenchantes

me dérotises

me désassembles me démantèles me déstructures

me désagrèges me décomposes Et tu me dis pourtant – je te déchaine je te délivre Tu me dis encore – je t'aime

t’adore ainsi Tu dérailles désaimes aussi


Paris, 14 décembre © Autobiopoèmes, REVER(S)


 

67



Lorsque je ne pourrai plus écrire je serai mort mais si mon cœur bat encore dans un corps sans âme machinalement comme la charentaise à la victoire aux ailes coupées qui sonnait les heures et les demi-heures des jours et des nuits de mon enfance n'attendez pas la descente des poids cylindriques on peut aussi figer le balancier pour que s'arrête le mécanisme insomniaque qui ose égrener les secondes les minutes les heures l'éternité


Paris, 16 décembre © Autobiopoèmes, REVER(S)


 


68




"Monsieur depuis au moins vingt ans vous risquez à tout instant

l’infarctus du myocarde

l’accident vasculaire cérébral

vous flirtez avec la mort en plus de vous protéger vous ne pourrez plus vous passer de La Machine adieu fatigue et perte de mémoire même votre libido sera décuplée

vous formerez la nuit un couple inséparable n'oubliez surtout pas de la brancher dès que vous vous allongez vous ne devez pas vous endormir sans ah j'oubliais vous devez supprimer de votre vie

tout ce que vous aimez boire et manger

à jamais

il est heureux que vous ne soyez obèse si vous pouviez moins travailler ce serait parfait mais n’est-ce-pas nul n'est parfait et puis bougez bougez bougez" SAOS

donc

deus ex machina


Docteur

la mort je la baise

avec révérence

quand je dors

quand je fais l’amour

d’ailleurs c’est elle l’obèse

à force de se goinfrer

à tous les râteliers

des jardins d’Éole

aux vagues de Manche et de Méditerranée

des disparitions brutales des pères de mes élèves

aux coups de brutes qui massacrent les femmes

des famines pour les enfants du Mali

au crabe qui dévore ceux de Roussy

des typhons des Philippines

aux cendres du Semeru

alors laissez tranquilles mes désirs

que serait la vie sans folie

Alors voilà

voilà pourquoi

il fallait faire de mon sommeil

un enfer Voilà pourquoi

depuis le jour (covidé) je sors masqué la nuit (en apnée) je dors masqué grand carnaval terne et plastifié sommeil cerné de tuyaux ancré à l'appareil et son chant des profondeurs comme un plongeur ligoté à son rocher Je ne dors plus

mes insomnies jouent avec les ombres persiennes du plafond et quand je dors je me vois sur le dos immobile le regard fixe comme s'il devenait impossible de me ré-animer si je m'endors enfin entre fin de nuit et petit matin les crocs du chat dans le tube souple me réveillent la bouche ensalée d'une voix d'outre-tombe je le repousse il faudra rafistoler l'air ne doit pas s'échapper

comme fuit toujours ma mémoire Je meurs chaque nuit du manque de tendre - on n'embrasse plus on ne câline plus un homme masqué le crâne sanglé tuyauté enchaîné libido bernique

berné l’amour aussi semble à bout de souffle Alors il me prend des envies de me désaliéner d'arracher les amarres de me défaire de ce corps incapable de s'entendre avec son cœur il me prend des envies de prendre le large de fuir les ports et les attaches

il me prend des envies

de lèvres sauvages

de parfums doux

de peaux veloutées

d’amours à en mourir

il me prend des envies

de me désentuber

de chanter fort et faux mais chanter quand même

de danser moi qui ne sais pas danser

il me prend des envies

après un café assassin de sommeil

de rhum cubain à l’orange et à la cannelle

où s’agite une gousse de vanille fendue

d’en boire à tutoyer les dieux

du fumer un tabac qui engrise mes poumons

jusqu’à l’asphyxie

il me prend des envies

de laisser les battements de mon cœur las libres de rythmer sans partition sans métronome de s'arrêter quand il voudra pour s'endormir

pour m’endormir enfin


Paris, 21 décembre © Autobiopoèmes, REVER(S)


 


70




Dans le vénéré vénal plus que vénérable vase en cristal de second choix flottent en taches écarlates sauvages et morts les pétales de mai de mes éphémères amours damnées condamnées celles que

ni par gout ni par choix

on choie

conchie enchaîne

entraine

à devenir croix en écorces de chêne liège roussies au feu de garrigue feues amours écorchées larmes fossiles piégées dans le marbre et ton visage impassible tagué dans l'impasse pisseuse où les poisseuses étreintes

ne survivent jamais au crépi qui s'effrite à l'été qui palpite et s'efface avant l'heurt je ne suis que vaurien adulescent vénérien à l'obsolescence mal programmée


Paris, 11 janvier © Autobiopoèmes, REVER(S)

 


71



Je ne suis que l’ombre l’ombre de la lune

à trembler sur la vague

à s’ensombrer dans l’écume amère


Je ne suis que l’ombre

l’ombre d’un nuage

enamouré du vent

et je dessine sur le sable des arabesques mouvantes


Je ne suis que l’ombre

l’ombre de l’éphémère rouillé

fragment de temps sépia

qui s’efface se tord et se consume sous la flamme


Je ne suis que l’ombre

l’ombre de ton amour

de ton cœur velours volage

entre étoiles surgies des décombres


Je ne suis que l’ombre

l’ombre engrisée de tes silences

l’ombre noircie de tes absences

l’ombre de mon ombre


L’ombre de rien



Paris, 20 janvier © Autobiopoèmes, REVER(S)





72




Because of the emptiness

you seem to see in my eyes

you think you read in my minds

that I'm waiting for you my lady

in the silence of my dreams

but I'm walking through my nightmare’s din

in the fleeting daylight


my eyes are wide open

they absorb the blinding light

of this fucking sun

but my soul stretched the chain

which prevents the enemy fleet

from entering the port

closed its door and shutters


my heart’s caulking

it’s barricading itself

it no longer feels

neither love nor hate

my soul has closed its door

you my queen you’re walking in the mud

and your mouth’s vomiting eels and frogs

you don't think anything anymore

your heart and your feelings

are dark brown and smells

of wet pussy and shit



Paris, 23 janvier © Autobiopoèmes, REVER(S)



 


73




Tomber n'est rien le jour tu te relèves la nuit plus forte plus grande tu serres les poings fracasses la porte les murs de plâtre de béton de brique les barreaux de fer aux fenêtres en trompe l'œil qui t'emprisonnent qui retiennent tes pas butent ton regard te séparent de ton amour Les nuits libèrent ce qu'asservissent les jours


Paris, 25 janvier © Autobiopoèmes, REVER(S)


 


74




Dans le chahut de mes délires

s'immiscent des fées sanguinaires

sans pitié

de leurs serres acérées

elles transpercent nos chairs exsangues

avalent ce qu'il nous restait d'âme

dénervent nos amours

dévorent nos cœurs


À la jointure de ton mutisme et de mes murmures

sans bris

le miroir se fissure en étoile

s'y créent autant de reflets

que de portions de glace


Es-tu plus belle

en fractales

es-tu celle qui mène le bal

aguiche

enchaine

se déchaine


Es-tu chatte

es-tu chienne


Suis-je esclave

suis-je maitre


Sommes-nous braves

sommes-nous traitres


En ce donjon des pestilences

aux oubliettes du silence

il faut égorger les souvenirs

dépecer les amours

incinérer les peurs

ne laisser aucune trace

que l'éphémère désir

assouvi


Je reste enceint

de ta semence amoureuse

de tes fluides comme brulure d'un passé pacifié


Il reste des lèvres à ma mémoire

une langue qui la baise

une main qui la fouille

une peau qui la colle et frissonne

de nos luxures lunaires



Paris, 5 février © Autobiopoèmes, REVER(S)


 


75




Dans le chalut de tes désirs

tu pêches des amours sans queue ni tête

des monstres avides qui peuplent ta flibuste

et tu jalouses malade les œillades des flottilles ennemies


À fond de cale

les esclaves entonnent un chœur de vie et de mort

ton cœur ravagé les condamne à l’anamour

dans ce grand voyage sans escale

Tu auras beau écailler les sirènes prises dans tes filets les griller

équeutées

étêtées

entre deux feuilles de laurier les croquer sur du pain polka avec une pointe de sel et du beurre de Surgères tu ne m'empêcheras ni de rêver ni d’aimer au-delà des mers

j’ai trop fumé le calumet

je reste sur ma hune

à draguer les étoiles

et peut-être la lune


Je te laisse les astérides mortes sur le pont

et draguer la vase

au fond de ton havre nacré


Je te laisse bouchère

poissonnière poisseuse

boucher l’entrée du vieux port


Je te laisse tes amours mortes au front

d’une guerre sans nom


Je serai bien loin

amoureux de Paname

panamoureux


Il sera bien tard

quand tu regretteras

ton Pan amoureux



Paris, 6 février © Autobiopoèmes, REVER(S)


 

76




J’ai beau frapper à grands coups de heurtoir

tout est silence derrière la porte du temps

lugubre et glace

Alors comme un voleur

je pénètre par effraction

remonte le couloir immense et vide

et pourtant parsemé d’embuches

des parvenues fontaines

des revenants ithyphalliques

sortent des murs

secouent leurs chaines

éjaculent leur haine


* * * * * * * * * * * * *


Je ne reconnais plus personne

ni dieu ni déesse

ni maitre ni maitresse

les interminables heures de labeur

ont anesthésié ma mémoire

Je suis seul

avec mes doutes

mes errances

ce mauvais rêve

à crever de peine

et ce temps d’étain qui passe

d’un désir de trépassé

à l’amour transpercé

d’une flèche cupide


* * * * * * * * * * * * *


Feues mes amours trépanées

par ton scalpel avide



Paris, 9 février

© Autobiopoèmes, REVER(S)



 

77




La peur sur tes mains encre à battre tes tempes le tempo de la pluie sur le carreau du temple Le silence du sablier désavoue le miel et laisse filer le temps au lit de la rivière Vers l'embouchure j'ai désamarré mes amours à les trop vouloir libres elles ont vogué sans chaine

loin de mes camps d’apaches loin de mes ports d'attache elles gonflent les voiles mais pas seulement elles se chargent d'écume s'emplissent de vent L'éphémère et le désir ont rompu l'alliance largué leurs armures jeté l'ancre délavée à figer les rêves et les mensonges La ligne d'horizon

se courbe se fracture à laisser se mélanger ciel et mer chœurs d'archanges et chants de sirènes

* * * * * * * * * * * * *

Haineuse en talion

experte hautaine en holocauste elle naufrage le temps et mon corps comme un navire honni

ravi sans peine à sa destinée chaviré sans livrer bataille épave désertée

envasée sous les brisures du grand sablier Jamais repue de ses festins d’amante religieuse

à l’affut de sa victime expiatoire

inlassable nécrophage elle profane en leur caveau mes amours

dissoutes de ses délires acides elle délivre les monstrueuses chimères à m'en dévorer l'âme à m'en calciner l'écorce


En juge érigée

elle condamne

exécute la sentence

jusqu’à ne laisser de mes amours

qu’une peine capitale

qu’un cœur exsangue incapable d’aimer

et quelques étincelles rougies au-dessus du bucher


Paris, 12-13 février

© Autobiopoèmes, REVER(S)


 

78




En lendemain de fête prestidigitateur loser en jour de défaite seul et sans flouze occis en pleine débandade sans pigeon sous mon kleenex ni mouette dans la manche sans amour en escarcelle sans même un treize après mon douze sans lest dans la nacelle bonimenteur aux rimes mauvaises à la poudre d’escampette chanteur de saudade aux mélodies médiocres venant de loin ni noires ni blanches un peu rondes un peu cloches un peu blondes un peu croches amoureux sans réciproque j’ai soldé mon sommeil à la solitude consommé non assaisonnés mes mots en mode pain dur hiver rude consumé mes nuits sans te rassasier à frotter nos peaux comme deux silex pour en jaillir l’insolente étincelle qui fait aimer avant le sexe le temps des cerises et l'échancrure des chemises j’ai conspué le ciel et ses orages sans espoir ses feux de paille ses éclairs d’indifférence ses arachnéennes étoiles j’ai bu tout l’amer j’ai bu toute la mer de toutes les mers jusqu’à la dernière algue jusqu’au dernier krill et l’ultime fleur de sel au creux de la vague à t’en bruler les lèvres dévaster les entrailles sans balise de détresse lacérer mes amours en franges j’ai noyé mes poumons de dentelle englouti mon cœur en exil submergé mes soleils et mes lunes déchu les anges gardiens de tes rêves il me reste tes je t’aime et tes allez marche ou crève merci maitresse finie l’ivresse

Paris, 15 février

© Autobiopoèmes, REVER(S)


 

79

Je saoule l’hiver à lui faire perdre la tête mais comme l’hydre de Lerne deux lui repoussent à la hâte chaque fois il revient à la charge on le dit général il n’est que monstre imbibé de vodka ses flatulences ses sécrétions trainent leur pestilence de la Seim à la mer Noire Pourquoi faut-il que s’enlise l'hiver pourquoi laisse-t-il moisir ses aubes blanches ses vêpres grisonnantes Hiver de givre à glacer les cœurs briser les reins mâtiner les peurs Ivre hiver d’armes de sang de larmes d’encens Hiver à mitraille hiver d’entrailles hiver de funérailles Hiver d’hymnes et de messes de déchirures de sales traitrises de lâches renoncements Parviendrai-je à caresser le printemps ses parfums ses couleurs ses chants mélodieux parviendrai-je à déflorer ses bourgeons Ma main s'est ridée dans la froidure mes doigts ne sont plus que fissures chacune d'entre elle parle amour et déraison si ce n'est désamour et raison je promène timide sur ta peau douce la rugosité de mes sentiments la morsure de mes émotions mais ni tes épaules ni ton dos ne se plaignent à mes oreilles résonnent les battements d'un cœur à la jeunesse harassée

Paris, 6-7 mars © Autobiopoèmes, REVER(S)



 


80

(Entre deux tours)

Voici le nouveau jour non pas le jour nouveau ça miaule et roucoule à l'aube bleue ça coule de mièvre non pas de miel j'ai chaussé mes sabots de sept lieues ma louve a les babines rouges pendante ma langue basse ma queue la gueuse cuve et couve sous son duvet de mauvais poil poison d'avril sa lune saigne on agite face au rêve le sigle noir aux lignes brisées mise en cène glauque perverse où pavanent paradent des croisillons – ces petits nazis en croisade – pas de loi pas de l'oie dans leur crâne siliconé nuages et vous hauts murs de grisaille chemins verticaux asphaltés je vous déteste vous masquez mon soleil et mes seins du vendredi sortez de mon silence et tant que vous y êtes posez ma chimère sous le paillasson si je retrouve ce soir ma sente sinueuse sans bourdon sans clairon avec ce qu'il faut de mousses et de fougères pour amortir mon cœur plombé je reprendrai mon rêve là où vous l'avez noyé


Paris, 15 avril © Autobiopoèmes, REVER(S)


 

81

(Fanaison)

Ton rêve fane au soleil sur un rayon de trop de suffisance sur ton cœur lunaire mère de l'intranquillité je sais ce sourire à tes yeux comme une ancre brisée mémoire d'étoiles défuntes

Paris, 13 mai © Autobiopoèmes, REVER(S)


 


82


(Traîtrises II)


La vie a dépoli mon visage

il en reste des ruisseaux de sel

et des taches de lune


J'ai caressé tant de clous et de pierres

que mes mains ont la rugosité

des murs décrépis

et la rouille des amours oubliées sous les intempéries

J'ai pris mon cœur dans les ronces

il en est sorti lacéré

et de chaque plaie s'échappe son souffle

extrême

ultime

Le métronome est brisé

la boussole affolée

le battement ne fait plus mélodie

nous ne voguerons pas vers le merveilleux


Couvert de cicatrices

le présent s'évapore

sans possible pardon

Depuis que tu l'as chassé de tes veines

mon sang cataracte

je te suis étranger

en migrance infinie

Mes rêves de simple et de beau

se dérobent dans les méandres d'incertains demains


Alors j'invente sans foi

des mots

des sons

des rythmes

artifices d'humanité

ersatz de jours meilleurs


un amour enfermé dans une bouteille à la mer


La Jarne, 4 mai

© Autobiopoèmes, REVER(S)


 

83


(Brocante)


Tu me penses cher

je te dépense

à ramper vers un rêve de toi

à solder de tout compte

nos amours liquidées

nos reliquats liquéfiés nos lettres de relance

nos fractures impayées

nos souvenirs brocantés

qui ne trouvent pas preneurs

qu’on brade à cinq heures

quand faiblit la flamme

qu’on bazarde à six

quand écrase la flemme

de remballer nos vies

dans de vieux journaux

froissés en fées d’hiver


* * * * * * * * * * * * *


Alors il ne reste entre nous

qu’une valise élimée

à la clef brouillée

à jamais exilée

nos mains hésitent

à saisir la poignée

mémoire rafistolée

de corps serrés

sur le quai de la gare

nos yeux résistent

nos cœurs s’enkystent

nos mains s’invitent

s’agrippent l’une à l’autre

en oublient sur la place

la valise amantée


* * * * * * * * * * * * *


Elles ne se lâcheront

que pour cogner nos verres

d’une infâme piquette

celle qu’on tète avant l’exil

au soir cruel des défaites

Paris, 24 mai

© Autobiopoèmes, REVER(S)


 

84



Visages de pierre

comme en prière

sagesse de mésange

ou de démon

sur un portail romancé


* * * * * * * * * * * * *


Soleil métis à mordorer le regard

à défier les vents

à défiler le temps

nous ne serons ni dieux

ni diables

mais dieux mâtinés de diables

démophiles


* * * * * * * * * * * * *


Si grésillent les châtaignes

sur nos peaux catinées

maculées de klein

découpées

collées

si nos corps matissés s’endansent

sur le Livre des abimes

entre enluminures

et sanguines icônes

sueurs et cuirs mêlés

si nos cœurs s’étreignent

en infernales rondes

le monde valse à l’envers

et sa tornade le disloque


* * * * * * * * * * * * *


À la lie de limbes indociles

nos âmes nues s’éteignent

exténuées à l’aube carmine

suppliciées dans cette transe sublime


* * * * * * * * * * * * *


Toute prophétie ne sera qu’autodafé


Paris, 25 mai

© Autobiopoèmes, REVER(S)


 

85



Aujourd’hui n’est que néant

vertige extatique

au bord du bord du monde

où devisent des visages masqués


* * * * * * * * * * * * *


Hier sera

un pétale de rêve à l’envers de tes cheveux

une étoile tatouée sur la pente de ton cœur

tu languiras sur les lattes ingrates

entre les seringues vides

les ombres persiennes

et le parfum des seringats


* * * * * * * * * * * * *


Demain fut

fuite du temps pressé

stigmates enfouis sous le tapis

mémoire en ruminance éternisée


* * * * * * * * * * * * *


Que désenchante le merle

aux pires jacqueries des pies

le soleil est de travers

déborde les planches

le temps épie la parole rebroussée

épuise l’amour retranché

dégorge son sel sous le déluge

de mes quarante jours

et mille et une nuits


* * * * * * * * * * * * *


Aujourd’hui clos

pléonasmique

jusqu’à l’écœurance



Paris, 11 juin

© Autobiopoèmes, REVER(S)

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